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Aventures sur l'eau (Waterland)

Les canaux peuvent offrir une alternative paisible à la vie agitée de la Ville.

James ENGLISH (Paul MANSFIELD) découvre un site bucolique à Paris.

Peu de gens connaissent les canaux de Paris, mais moins d'une demi-heure après avoir quitté mon hôtel du centre-ville, je flânais sur un chemin de halage bordé de peupliers, sans aucun bruit, excepté des chants d'oiseaux et le clapotis de l'eau.
Hervé Revel, président de l'Association « Au Fil de l'Ourcq », m'accompagnait. « Regardez », dit Hervé avec un sourire lorsqu'un trio de canards passa en barbotant et qu'une pie sautilla dans les branches : « C'est la nature dans la ville ». Il y a trois canaux à Paris, bien que techniquement, ils forment un simple réseau de plus de 120 kilomètres, aboutissant au Bassin de la Villette dans le centre de Paris. Celui-ci, l'Ourcq, fut construit par Napoléon en 1802 pour apporter de l'eau aux habitants de Paris, et s'étend sur plus de 100 kilomètres dans la campagne, à l'est de la Ville. Une partie est navigable et jusque récemment il était possible d'y faire des excursions pour la journée en partant de Paris, mais de nos jours, le moyen le plus simple pour atteindre ses plus jolies sections est de loin un court parcours en chemin de fer.

Le second canal de Paris est celui de Saint-Denis, qui serpente sur 6,5 kilomètres environ de La Villette jusqu'à la magnifique basilique de Saint-Denis, la cathédrale du 12ème siècle qui fut à l'origine du style gothique dans l'architecture européenne.
Malheureusement la promenade de deux heures est incontestablement inintéressante, à travers des dépôts d'ordures, des immeubles condamnés et des usines désaffectées.

Peut-être le plus surprenant des trois canaux, comme je l'avais découvert quelques jours plus tôt, était le canal Saint-Martin. Celui-ci fut construit entre 1806 et 1825, et forme un ruban de 4 kilomètres environ entre La Villette et la Seine. Bien qu'il soit juste sous leur nez, peu de Parisiens le remarquent. À La Villette, par un matin venteux, environ 20 personnes s'étaient rassemblées pour la croisière bi quotidienne le long du canal. La Villette elle-même, autrefois un secteur rustre de la classe ouvrière, est en pleine transformation, due largement au Parc de la Villette, une attraction touristique moderniste bâtie autour de la Cité des Sciences qui attire 5 millions de visiteurs chaque année.

Cependant quelque chose de l'ancienne atmosphère reste. Les rives de La Villette sont bordées de maisons exiguës et de sombres entrepôts ; seuls un ou deux d'entre eux ont jusqu'ici été convertis en inévitables cafés et restaurants. Ici le canal est encore essentiellement un endroit laborieux, avec les entrepôts en activité et les énormes péniches noires transportant du gravier qui passent et descendent vers la Seine.

Notre propre « vaisseau » fut une vedette confortable avec un snack-bar et un siège en plein air sur le pont supérieur et un guide qui commentait le trajet en français et en anglais. Nous avons quitté La Villette et avons mis le cap vers le sud à travers le 10ème arrondissement, contournant la gare de l'Est et longeant la rue du Faubourg Saint-Martin.

Après la grisaille industrielle des faubourgs, tout devenait soudainement pittoresque. Platanes et châtaigniers bordaient le canal ; nous croisions des patineurs à roulettes, des randonneurs, des promeneurs avec leurs chiens, des retraités qui jouaient à la pétanque à l'ombre. C'est le Paris traditionnel et familier que l'on voit dans des centaines de films.

D'un bateau, on a un regard intime sur la Ville, on se déplace comme si on traversait la vie des gens. Nous avons passé des écluses et sous de jolies passerelles du 19ème siècle avec des garde-fous en fer forgé. Nous nous sommes enfin frayés un passage sous la voûte du tunnel du Temple longue d'environ 1,5 kilomètre qui nous a amenés sous la Place de la Bastille.

Nous naviguions à mi-vitesse, avec le plafond du tunnel en briques juste au-dessus de nos têtes et de pâles rayons de lumière qui filtraient à travers les puits d'aération. Nous avons enfin émergé au soleil au Port de l'Arsenal, près de la Place de la Bastille. Ici, des yachts avec des noms tels que Méandre et Neptune, sont amarrés près de vieux bateaux délabrés aux hublots garnis de fleurs.

J'ai ensuite parcouru le demi-mile suivant vers le Quai de la Râpée où le canal Saint-Martin, retenu par une série d'écluses, se vide dans la Seine qui coule lentement, avec la flèche de Notre-Dame s'élevant juste en amont. Une vue superbe et un coup d'œil sur un Paris secret dont je n'imaginais pas l'existence.

Quelques jours plus tard, sur le canal de l'Ourcq, avec M. Revel, ce fut une histoire identique. Est-il vraiment possible que cette tranquillité bucolique puisse survivre à seulement quelques kilomètres à l'extérieur d'une des capitales les plus agitées du monde ? C'est pourtant l'évidence même. « C'est un endroit secret » dit M. Revel, un élégant senior de 65 ans. « Même de nombreux riverains ne viennent jamais ici ». Là où les villages apparaissent, les rives du canal les cachent à leur vue jusqu'à ce que l'on soit juste tout près. À Tremblay, nous nous sommes arrêtés devant le Mémorial élevé aux 15 otages atrocement assassinés par les Allemands en 1940.

À Villeparisis, un marché hebdomadaire se tient sur une place de la ville. Fromage et saucisses sont étalés à côté de bouteilles de cidre de Normandie et de présentoirs de vêtements. L'endroit est très fréquenté.

Mais en retournant au canal, l'atmosphère paisible était inchangée. Maintenant le paysage s'était aplani au fur et à mesure que le canal se rétrécissait. Nous sommes passés sous un pont routier très fréquenté, l'avons laissé loin derrière, et bientôt, après une courbe, nous sommes arrivés dans un village avec une vieille église en pierre, Claye-Souilly, la fin de la ligne.

Claye-Souilly est un joli endroit juché sur les rives du canal. France, l'épouse de M. Revel, nous attendait à l'Auberge du Cheval Rouge, une de ces institutions françaises typiques, avec un groupe d'ouvriers qui se désaltérait, assis au comptoir, et un restaurant avec un jardin clos cultivé. Le déjeuner fut assez long : le menu comprenait une salade au fromage de chèvre, du veau à la sauce moutarde, du fromage et des profiteroles ; de notre table, nous pouvions observer le soleil se reflétant dans l'eau de canal.

Puis retour à contrecœur dans le centre de Paris et le monde de la vitesse et du bruit.

L'essentiel des canaux de Paris :

Canal de l'Ourcq :

prendre le RER B (direction Mitry-Claye) du centre de Paris jusqu'� Vert Galant.
Le canal de l'Ourcq coule près de la gare.
Se diriger vers l'Est en traversant Tremblay et Villeparisis : on atteint Claye-Souilly en quatre heures environ.

Canal Saint-Martin :

« Canauxrama » (Tél : 0033 1 4239 1500 ; www.canauxrama.com) : deux excursions en bateau chaque jour dans chaque direction, partant du Bassin de la Villette à 9.45am et 2.45pm.
Adultes : £9 ; enfants de 6 à 12 ans : £5.50 ; durée : 2h.30.

Canal Saint-Denis :

uniquement pour des « mordus » des canaux, mais on peut atteindre Saint-Denis par le métro (station Saint-Denis Basilique).

Article paru dans le «Daily Telegraph » du 02.09.2003
traduction : Claude MINART
Publié avec l'autorisation de l'auteur

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